L’HEURE CIVIQUE, UNE GENEROSITE CONTAGIEUSE

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Interview d’Eric SALAUN,
Maire de Chavagnes en Paillers
Propos recueillis par Arthur Atlas.

E – Vous êtes en pointe dans le dispositif de l’Heure Civique en Vendée. Qu’est-ce qui vous a séduit dans cette initiative ?

Cette initiative s’inscrit pleinement dans notre volonté d’amplifier l’élan solidaire déjà présent pour renforcer la cohésion sociale sur notre territoire, celle qui contribue au mieux vivre ensemble dans toute la diversité des habitants qui composent notre commune. L’heure civique se veut avant tout comme une nouvelle étape d’un engagement citoyen fort.

E – Pourquoi avoir mobilisé particulièrement les jeunes ?

Parce que les jeunes nous montrent l’exemple dans leur engagement au sein des établissements scolaires, parce que ce sont les forces vives de demain, parce que dans une société qui encourage parfois le repli sur soi et l’individualisme, renouer avec des actions collectives donnent simplement du sens à notre quotidien. Ce sont de vraies locomotives ! À nous de les accompagner et de les encourager.

E Comment voyez-vous évoluer le vivre ensemble dans votre commune ?

Mettre au cœur de notre action communale l’encouragement et l’engagement de tous pour développer de nouvelles solidarités de proximité ne peut être que positif.

La mise en place de l’heure civique a déjà permis l’inscription de plus de 50 personnes qui souhaitent s’engager 1 heure, ou plus. Apporter son aide aux autres procure du bonheur.

 

Interview de Nathalie LEMARCIS,
ambassadrice bénévole de l’Heure Civique à Auchan sur Vendée
Propos recueillis par Arthur Atlas

E Vous vous êtes fortement impliquée pour cette initiativeaux côtés de la Mairie. Qu’est-ce qui vous a motivé ?

L’esprit d’entraide et le partage. Cela vient peut-être de mon métier. J’étais Aide-soignante et maintenant retraitée.

E Comment cela a-t’il démarré ?

 Je me suis rapproché de la Mairie, on a organisé les choses. Je rencontre le bénéficiaire et le bénévole pour évaluer les besoins et trouver le bénévole le plus pertinent. Je présente toujours les bénévoles aux bénéficiaires moi-même. Je ne reste que 10 mn avec eux pour m’assurer que tout va bien se passer. Puis je m’éclipse. Nous organisons aussi des rencontres plus larges tous les trimestres pour que tout le monde se rencontre.

E – Pensez-vous que cette initiative peut significativement améliorer le vivre ensemble dans votre commune ? Voyez-vous déjà des résultats significatifs ?

L’esprit d’entraide préexistait dans ma rue par exemple. Mais l’extension à toute la commune a bénéficié à tous. Notre action est surtout orientée vers les personnes âgées. Mais nous essayons d’élargir, créer des liens avec les écoles, entre les générations.

Il y a plein d’exemples concrets. Par exemple, dans un couple âgé, un vieux Monsieur n’allait plus au club des anciens, car il devait s’occuper de sa femme et rencontrait des problèmes de transport. Nous avons pu résoudre le problème grâce à l’heure civique et il va beaucoup mieux.

Interview de Geoffroy Boulard,
Maire du XVIIe arrondissement de Paris
Propos recueillis par Arthur Atlas.

E – D’où vient l’idée de mobiliser des volontaires pour retisser les liens sociaux dans les territoires ?

L’Heure Civique est née de la crise sanitaire de 2020, révélatrice d’un élan de solidarité inédit parmi les citoyens. Cette période difficile a vu émerger de nombreuses initiatives d’entraide, illustrant la capacité des gens à se mobiliser spontanément. Fort de cet élan, avec Atanase Périfan, adjoint en charge de la mobilisation solidaire, nous avons voulu pérenniser cette dynamique à travers un dispositif flexible, abordable, en invitant chacun à contribuer, selon ses moyens, à la solidarité de proximité.

E – Quels sont les premiers enseignements de ce dispositif ? Etes-vous satisfaits ?

Les enseignements sont extrêmement encourageants. L’initiative a suscité une adhésion massive dans le 17e, avec plus de 1 800 volontaires. Elle s’est étendue à plus de 140 communes et départements, avec des milliers de volontaires. Cette réaction très positive souligne l’appétit pour l’engagement citoyen et la solidarité spontanée de proximité, confirmant notre conviction que le tissu social ne se renforce pas uniquement par des politiques publiques : l’action concrète et collective est un levier extrêmement puissant.

E – Comment articulez-vous les moyens municipaux avec la mobilisation des volontaires ?

L’articulation entre les moyens municipaux et la mobilisation des volontaires repose sur une stratégie tripartite : la solidarité naturelle, organisée, spontanée. Nous portons des initiatives au niveau municipal, comme des ateliers pour l’inclusion numérique à destination des seniors. Nous organisons la mise en place d’un réseau solidaire d’acteurs locaux, mais toujours en favorisant l’émergence d’une solidarité venue des citoyens. Cette approche permet d’engager efficacement les habitants dans des actions de solidarité en partant des gisements naturels de générosité.

E Comment comptez-vous déployer l’initiative plus largement ?

Fort d’une reconnaissance nationale illustrée par le Prix Territoria 2023, notre ambition est de continuer à développer l’Heure Civique. Dans le 17e bien sûr, en accroissant notre base de volontaires et en faisant connaître le dispositif à tous les habitants. Mais aussi dans toute la France, en invitant les collectivités, les maires à installer l’Heure Civique sur leurs territoire. C’est l’objet des premières Assises nationales de l’Heure Civique qui auront lieu le 29 février à la Mairie du 17e.

E – Comment voyez-vous le vivre ensemble et les solidarités évoluer ?

Il faut être lucide sur les constats : le vieillissement de la population, l’isolement, la recherche de sens par les jeunes générations ne sont pas des plus réjouissants ! La première des réponses, la plus naturelle, à ces problèmes majeurs, c’est le lien entre les personnes. L’Heure Civique prend cet élan au vol et lui donne une direction, une porte à laquelle frapper.

Interview d’Atanase Périfan,
Fondateur de la Fête des Voisins
et co-fondateur de l’Heure Civique
Propos recueillis par Arthur Atlas.

Né en 1964 à Paris ce dirigeant d’associations et maire-adjoint dans le XVII e arrondissement est le créateur de la Fête des Voisins et le fondateur de l’association Voisins Solidaires. Militant infatigable du vivre ensemble et des solidarités de quartier, il a récemment cofondé le concept de l’Heure Civique. Il préside la Fédération européenne des solidarités de proximité.

E – Quel regard portez-vous sur votre parcours d’un quart de siècle au service des solidarités de proximité ?

Je n’en retiendrai sans doute que deux choses essentielles. La première, c’est le bonheur de faire ce que je fais, ce qui nourrit mon énergie au quotidien. Mon engagement a donné du sens à toute ma vie et fabriquer du lien social ça ne rentre peut-être pas dans le PNB d’un pays mais si on est que dans le pouvoir d’achat, on ne va pas y arriver. Il faut aussi créer d’autres richesses bien plus essentielles me semble-t’il ! Une meilleure santé, un meilleur bien être et un vivre ensemble apaisé. Tout cela à une valeur inestimable au sens propre comme au figuré.

La seconde ce sont toutes les belles rencontres que j’ai pu faire pendant 25 ans. Rencontrer de gens positifs, souvent plus d’une centaine par jour, c’est mon adrénaline. Cela me dope tous les jours pour aller toujours plus loin !

E – Comment voyez-vous l’évolution du lien social et du vivre ensemble dans notre société aujourd’hui ?

Je crois que la défiance est en train de tuer le lien social. Il faut rétablir la confiance. Confiance envers les élus, confiance envers l’école, confiance envers son voisinage, la communauté …. Pour moi, la grande question va être comment la générosité citoyenne va pouvoir irriguer l’action publique dans un environnement où nous n’aurons plus les moyens de tout faire.

E Pensez-vous que les solutions que vous proposez sont suffisantes à rétablir la situation ?

Il faut un effet d’entrainement et un discours mobilisateur. Rien ne se fera en un jour. Je ne suis pas naïf. Je sais bien qu’on ne transforme pas un inconnu en ami avec deux gobelets au pied d’un immeuble. Mais avant de devenir ami, il faut se connaitre, lever les doutes, construire une relation de confiance. C’est un peu le sens de l’allégorie du renard dans

« Le Petit Prince ». Dans sa naïveté, le petit Prince lui demande s’il veut être son ami, mais le renard lui répond qu’il faudra auparavant l’apprivoiser ! C’est le travail que nous faisons au quotidien, nous aidons les gens à s’apprivoiser. Ensuite, un monde des possibles émerge dans les solidarités de proximité.

E Quels possibles ?

Toutes sortes. Cela peut aller jusqu’à l’amour. La fête des voisins à ses bébés. Nous recevons des messages de remerciement parfois surprenant. D’autres ont trouvé des emplois, d’autres ont juste amélioré leur quotidien, résolu un problème, sont un peu sorti de leur solitude. Chacun de ces petits cas est pour nous une petite victoire et la récompense de notre engagement. Et surtout cela peut fonctionner dans tous les sens. Les jeunes peuvent soutenir le maintien à domicile des plus anciens mais les retraités peuvent aussi aider les parents et l’école à résoudre des problèmes d’égalité des chances.

E – Comment expliquez-vous que les politiques nationaux ne se soient pas plus servis de cet outil et de votre expertise sur le sujet ?

Il y a des moments où j’ai voulu être député, pourquoi pas Ministre. Cela m’aurait facilité la tache peut-être. C’est vrai que parfois après 500 Km de voyage on me dit que finalement le Maire ne peut pas me recevoir. Accompagné du préfet ce serait parfois plus simple. Mais en fait j’ai aussi une liberté extraordinaire pour lancer des projets, mobiliser, convaincre. J’aurais sans doute été très malheureux dans ces cercles de pouvoir. Chacun a sa place. La mienne est au front. Il faut être sur le terrain, embarquer les gens ! Pour délivrer une telle énergie, il faut du bonheur dans ce qu’on fait. Et je suis heureux, comme jamais.

Pour ce qui est des grands politiques, j’en ai rencontrés beaucoup. Il y a eu une certaine écoute. Même Jean-Louis Borloo qui aurait pu être un accélérateur. Mais cela n’a jamais vraiment suivi. Je ne sais pas vraiment l’expliquer.

E – Vous dites être émerveillé par l’engagement des élus lo- caux, en particulier des Maires. Pouvez vous nous expliquer les raisons de cet émerveillement ?

Je pense que notre société à muté. Il y a 20 ans, on se battait pour être sur les listes électorales pour être élu. Aujourd’hui il y a des démissions en pagaille et les Maires, quand on en trouve un, courent après les candidats pour boucler leur liste ! Que s’est-il passé ? Comment as-t ‘on pu tuer ce désir de servir la communauté ? Du coup ceux qui restent ne chôment pas et ces mandats nécessitent un engagement total, bienveillant et une singulière résilience. Car beaucoup d’administrés critiquent, peu contribuent au bien commun et les problèmes sont d’autant plus aigus que les villes sont petites car les moyens manquent. Dans une grande ville quand il y a un problème, on peut temporairement concentrer des moyens pour le traiter. Dans les plus petites, il n’y a souvent pas de moyens du tout. Si cet échelon lâche … c’est la porte ouverte a des problèmes beaucoup plus graves ! Je suis un élu d’une grande ville. Mais pour moi les élus des petites villes sont les héros du civisme ordinaire. Celui qui a bas bruit tient encore notre société.

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