Appel à projet, appel d’air… Le Mashup Culture®️ entend faire converser les ethnies, les histoires, les origines et les aspirations. Sa créatrice, Faouzia Rejeb, porte le projet comme un sacerdoce et proposera le 18 avril la deuxième édition de ce concours radicalement différent. Tour d’horizon.
« La diversité culturelle, c’est fêter et encourager les différences ». La formule n’est pas une phrase bêtement lancée en l’air pour Faouzia Rejeb. C’est le fil conducteur de son parcours. Directrice d’une agence de communication, elle développe des formations et des projets artistiques pour soutenir cette vision ouverte de la société. Depuis deux ans, elle organise le Mashup Culture®️. Concours dédié aux esprits fertiles et manifeste pour une société plus inclusive, l’opération permet aux étudiantes et aux étudiants d’Île-de-France d’exprimer leurs valeurs au travers d’un montage vidéo très spécifique. « Il s’agit d’associer des images d’archives, des extraits de clips ou de films, avec des musiques et des mélodies qui, sur le papier, n’ont rien à voir avec », énonce-t-elle. Tout l’enjeu du procédé repose justement sur ce choc des cultures, sur cette surprenante association d’univers et de contextes jusqu’ici inexplorés. L’an passé, plusieurs dizaines de productions ont été proposées par les candidats. Des productions mettant en exergue la dualité d’une origine ethnique, une passion culturelle, une danse, un héritage. D’un montage à l’autre, ce sont des tranches de vie qui tiennent parfois de la première confession, qui émergent.
Le Mashup n’est certes pas une notion nouvelle. Pour le présenter, on parle facilement de montage vidéo et de mixages pour trouver des effets intéressants. Mais c’est son utilisation pour le bien commun et le vivre ensemble qui constitue une nouveauté. Aux yeux de la conceptrice du prix, c’est un ensemble de valeurs qui s’impose dans le discours. « Cette notion de Mashup renvoie à la reconnaissance des diversités et des cultures, au respect des différences et à l’idée de célébrer la tolérance », assure-t-elle.
Plus que jamais d’actualité, la question de la diversité fait partie intégrante de la démarche du Mashup Culture®️: « Le fait de monter des projets célébrant la diversité et le respect des différences est plus que jamais important. Le Mashup est un mix des cultures. Non pas un effacement, mais une valorisation de nos patrimoines culturels. Il y a un côté fun, artistique, créatif. Mettre en lumière notre sensibilité culturelle et artistique par le prisme de cette diversité m’a paru utile et impactant », confirme-t-elle.
« Le sens du projet, c’est notre capacité à creuser dans sa propre histoire », assure Faouzia Rejeb. Mais la démarche va bien plus loin encore et s’inscrit dans le propre parcours de sa fondatrice.
« Je suis d’origine tunisienne. J’ai la chance de venir d’un pays qui m’a donné le goût de la liberté. Mais en arrivant en France, vers 1995, j’ai déchanté. On a fait peser sur moi un double handicap. Celui d’être femme et d’être vue comme ‘’orientale ou arabe’’. Une double peine qu’on me renvoie et qui m’oblige à décupler mes efforts pour m’imposer », soutient-elle. Faouzia Rejeb se considère comme l’héritière d’une société ouverte qui donnait une place et une liberté aux femmes. Une société où le son et l’image tiennent lieu d’enjeu central dans le vivre ensemble.
C’est tout le charme de la Tunisie, et plus généralement, celui du Moyen-Orient vécu par la créatrice. Et face aux inégalités qu’elle rencontre, Faouzia sent monter une colère productive et engagée. Le Mashup est né d’un sursaut et se répand dans les esprits comme une traînée de poudre, notamment auprès des jeunes. C’est un combat contre les normes et la pensée linéaire. « Contre les injustices aussi, précise-t-elle. On imagine que les gens peuvent se rencontrer facilement aujourd’hui. Mais c’est tout l’inverse. Internet nous sépare et nous isole dans des bulles de stéréotypes et de représentations biaisées. On a besoin de faire l’effort pour accepter la différence dans un monde binaire. On est loser ou winner. C’est une vraie violence ».
Le 18 avril prochain, la deuxième édition du Mashup Culture®️ se tiendra dans les locaux de la prestigieuse maison de production Mediawan, au cœur de Paris. Comme l’an dernier, elle sera l’occasion de découvrir des engagements et des visions atypiques de la société. Mais au-delà, elle offrira une perspective assez fidèle d’une société beaucoup plus mêlée qu’on ne saurait le croire. Une société où les racines côtoient les dernières références culturelles, où un slam peut enrober une danse tribale et un sonnet épouser les pas d’un acteur star du cinéma muet. Trois prix allant de 250 à 1000 euros récompenseront les meilleures productions. En attendant le soir de la cérémonie, Faouzia Rejeb et son équipe continuent de passer de classe en classe, de rencontrer les étudiants de nombreuses écoles supérieures franciliennes pour délivrer le message principal du Mashup Culture®️ : De la diversité naît une richesse commune.
Jérémy FELKOWSKI